L’assistance à la procréation permet aux couples qui rencontrent des difficultés de pouvoir se faire aider dans ce beau projet de vie. Techniquement, ce sont des démarches médicales qui permettent de dépasser les soucis physiques qui empêchent le couple d’obtenir un embryon ou de mener à terme la grossesse.
Voici l’aspect technique de ces démarches mais qu’en est il de l’aspect humain ? Comment ces couples vivent cette expérience? Quel regard porte-t-on sur eux ?
Derrière cet acte médical très spécifique se cache des histoires de vie parfois compliquées, parfois éprouvantes et toujours très émouvantes.
Nous vous proposons de découvrir le parcours de ces couples qui ont vécu ou vivent ce genre de démarches et ainsi de mieux comprendre pourquoi la fiv n’est pas un acte médical comme les autres. Deux femmes ont accepté de me livrer leur ressentis : Mesdames D (7 années de fiv et qui sont à ce jour pas terminées) et S ( 4 années de fiv qui ont abouti à une grossesse menée à terme). Voici leurs témoignages:
Quels types d’examens médicaux doit-on faire pour entreprendre une fiv ?
D : Tout dépend du problème de fertilité au sein du couple.
Dans tous les cas le gynécologue va faire une échographie, faire faire une prise de sang afin de contrôler les hormones qui entrent en jeu lors de la procréation et le taux d’AMH qui permet d’évaluer la fertilité de la femme. L’homme aura lui aussi une prise de sang à effectuer et un spermogramme voire une spermoculture pour analyser en détail la qualité du sperme.
En fonction du ou des soucis que rencontre le couple, il peut être demandé d’effectuer un caryotype, un test de hunher, une hystérosalpingographie qui sont des examens complémentaires et précis.
Pour ma part atteinte d’endométriose (maladie qui a pour effet la prolifération du tissu de l’utérus vers les organes voisins), j’ai dû à plusieurs reprises rencontrer un spécialiste de cette maladie afin d’avoir une idée de son stade et de l’étendue de sa propagation sur les organes car elle aura une influence négative sur la procréation.
S : Les examens médicaux lorsqu’on entreprend une FIV peuvent être nombreux. En amont, il faut établir un diagnostic précis pour déterminer la cause des échecs lors des précédents essais.
Une fois la cause établie, on se lance dans la FIV et il faut passer plusieurs étapes:
- un traitement hormonal en vue d’une ponction d’ovocytes (ovule). On fait des injections dans le ventre ou dans le haut de la fesse. Vous pouvez faire ces injections vous même ou faire appel à une infirmière.
- Prise de sang et échographie: afin de déterminer le meilleur moment pour réaliser la ponction d’ovocytes, on effectue des prises de sang qui mettent en évidence les dosages hormonaux et des échographies pelviennes pour observer la taille des follicules (sacs qui transportent les ovules). Ces examens sont réalisés tous les deux jours voir plus si nécessaire.
Lorsque les follicules sont arrivés à maturité, le spécialiste peut les ponctionner:
- Ponction ovocytaire. Cet acte est réalisé sous anesthésie générale en ambulatoire.
En parallèle, le même jour, l’homme fait un recueil de sperme.
Les équipes médicales mettent ensuite en culture les ovules récoltés et le sperme afin que des embryons soient formés.
L’étape suivante pour le couple est :
- le transfert d’embryon dans l’utérus de la femme. Cet acte est rapide et indolore.
Enfin vient l’attente. La femme fait un test de grossesse via une prise de sang 10 à 12 jour après le transfert pour savoir si l’embryon s’est accroché ou non. En parallèle, la femme continue de prendre un traitement hormonal, au moins jusqu’à la prise de sang et plus si nécessaire.
Si le test est positif, deux autres tests seront prévus dans les semaines qui suivent pour contrôler l’avancement de la grossesse. Si le résultat de la première prise de sang est négative, un nouveau transfert d’embryon sera à réaliser.
Comment vivez-vous ce parcours médical?
S : Tout d’abord il faut accepter le constat: naturellement, il nous est impossible d’avoir un enfant… Des questions sans réponses deviennent redondantes telles que: pourquoi cela nous arrive t’il? Qu’avons nous fait pour en arriver la?
Avec un peu de recul, il est évident que nous ne sommes pas responsable de ce genre de problème de santé et que se culpabiliser n’arrange en rien la situation lors de ces démarches.
Ensuite, il nous a fallu accepter que d’un acte très intime qui est celui de faire un enfant avec l’être aimé, nous allions devoir déléguer cette tâche à toute une équipe médicale qui allait rentrer dans notre intimité. On bouleverse alors les schémas naturels, on est déstabilisé par tout ce parcours qui nous donne presque l’impression d’être “malade”.
Heureusement, le staff médical sait se montrer rassurant, discret, pudique même pour nous rendre la tâche moins compliquée. Le parcours médical est alors plus rassurant, plus facile à vivre.
Mon mari a toujours été d’un grand soutien. Malgré un corps qui parfois changeait avec les traitements, il restait très élogieux envers moi. Je pense qu’il se sentait impuissant par rapport à tout ces examens et traitements que seule la femme doit subire. Sa présence suffisait à me réconforter dans nos démarches.
D : En début de parcours (il y a plus de 7 ans) j’ai pris les choses avec philosophie même si cela était contraignant d’avoir à jongler avec le travail puisque les examens doivent être effectués à des jours très précis en fonction du cycle.
Les années passant et n’étant toujours pas enceinte, il a fallu creuser et faire de multiples examens, opérations… A chaque examen une appréhension était présente car plus on réalise des examens plus les médecins peuvent trouver des anomalies.
A côté de ça il faut reconnaître et accepter qu’en effectuant toutes ces visites chez les médecins on entre dans notre intimité la plus profonde et cela peut être gênant.
On parle de traitements hormonaux, quels en sont les effets sur le corps ? Ont-ils d’autres influences ?
D : Les traitements hormonaux pour ma part on eut comme effet énormément de fatigue, de l’irritabilité et une petite prise de poids (qui peut être plus importante en fonction de la patiente).
S : J’ai pu constater une prise de poids lors de mes traitements. La fatigue est sans doute ce qui ressort le plus. Les hormones peuvent provoquer une grande fatigue et ce qui se rajoute à ça c’est tout le stress que les protocoles impliquent: faire les prises de sang à 7h le matin suivis d’une échographie pelvienne, puis on court partir au travail pour ne pas arriver trop en retard et ce tous les deux jours voir plus si besoin. Il en résultait que j’étais à fleur de peau, très émotive.
Après le transfert d’embryon, que se passe-t-il ?
S : On continue le traitement hormonal jusqu’à la prise de sang qui révèle notre taux de béta HCG. C’est pour ma part l’étape la plus délicate: la pression monte, pour la femme et pour l’homme pendant les 10 jours qui suivent le transfert d’embryon.
On essaie alors de s’occuper l’esprit au maximum, tant bien que mal!
Mon mari était alors d’un grand soutien: sorties, week end en amoureux, il ne manquait pas d’imagination pour me faire penser à autre chose!
Vient le résultat tant attendu. Lorsque celui-ci tombe et qu’il est négatif, on se retrouve seuls, devant ce bout de papier, qui nous fait comprendre que nous avons failli être parents mais que ca n’est pas encore pour tout de suite. Pourquoi l’embryon n’a t’il pas réussi à se fixer? Ai-je fait quelque chose qui a empecher ca ?
L’embryon ne peut malheureusement pas toujours se fixer à la paroi utérine, tout comme lors d’un essai naturel. Il faut alors recommencer la FIV.
D : Une phase d’attente interminable commence et les questions fusent plus que d’habitude :
Puis-je faire ceci ou cela pour permettre à l’embryon de s’accrocher? Suis-je enceinte ? Dois-je me reposer au maximum ou bien continuer à vivre ma vie normalement ?
Le temps paraît une éternité et je scrute les moindres symptômes de mon corps qui pourraient m’indiquer si je suis enceinte ou non.
Comment gère-t-on un échec?
D : « Gérer » est un bien grand mot. Je considère que l’échec est un traumatisme.
Afin de se relever d’un négatif il est important d’évacuer cette tristesse, de prendre soin de soi et surtout de préserver son couple au maximum. Il faut beaucoup de temps pour « accepter » l’échec vu le parcours et toutes les contraintes que demandent une FIV.
Au fil du temps cela devient obsessionnel, pas une journée sans y penser, sans se dévaloriser. Une perte de confiance en soi se créée, et le sentiment de ne pas se sentir femme nous e ronge. On se sent anéanti, on culpabilise mais il faut trouver la force de se relever et reprendre de l’énergie pour en entamer une prochaine FIV et tenter de réaliser notre rêve de devenir parents un jour.
S : c’est sans nul doute l’étape la plus compliquée de la FIV lorsqu’elle survient. Dès le début de ces démarches, le couple est conscient de ce qu’il est entrain de réaliser, il met tous ces espoirs dans la médecine, sa vie tourne autour des rendez vous, des pensées quotidiennes et enfin de ce résultat si attendu.
La déception est donc terrible lorsqu’on réalise, seuls devant ce bout de papier qui va nous révéler si notre vie va changer, que nos espoirs nous échappent.
Les essais s’enchaînent et au fur et à mesure, les doutes grandissent. Allons nous avoir la chance d’être parents en jour ?
Les premiers échecs n’ont pas été “géré” mais plutôt subis. Ensuite j’ai eu besoin de m’impliquer personnellement dans toutes les étapes de la FIV pour ne plus avoir l’impression de subir les choses, ne plus devoir me dire que c’était quelqu’un d’autre (la médecine) qui faisait à ma place. Pour se faire, j’ai fait de la sophrologie, j’ai parlé à mes embryons de leur conception jusqu’à leur transfert dans mon corps. L’échec était toujours difficile à vivre mais j’avais le sentiment de plus m’impliquer et de devenir à ma façon actrice de ce qui nous arrivait.
Mon mari quand à lui est plus introverti. Il exprime moins ses émotions, sans doute pour ne pas me rajouter de peine dans les moments difficiles. Il gardait une motivation infaillible qui me permettait d’avancer et de continuer.
Quel est le regard de vos proches ? De vos collègues ?
S : l’entourage est touché par notre situation bien sûr. Le soutien de nos familles et de nos proches sont indispensables pour réussir à mener à bien toutes ces démarches.
Cependant, il y a des personnes de notre entourage qui ne se rendent pas compte de tout ce qu’une FIV implique, tant au niveau médical qu’au niveau psychologique et émotionnel. Ils sont alors très prévenant et nous donnent des conseils pour arriver à nos fins facilement et rapidement. Des conseils qui leur paraissent évident comme: “il ne faut pas y penser et ca viendra tout seul”.
Essaie de ne pas y penser lorsque tu te fais 3 à 5 injections hormonales dans le ventre chaque jour et que tous les deux jours tu es à l’hôpital pour la prise de sang et l’échographie! Essaie de ne pas y penser lorsque après la ponction ovocytaire ton corps génère des effets indésirables très douloureux pendant plusieurs jours.
Essaie de ne pas penser à être mère, ce désir si viscéral qui te vient des tripes.
Certaines réflexions de connaissances qui ne savent pas que nous sommes dans ce genre de démarches sont parfois piquantes, voir blessantes: “A votre âge vous n’avez toujours pas d’enfant?!” ou encore: “Il est temps de s’y mettre!”.
Il faut alors prendre sur soi et dépasser tout ça. Il est préférable de penser à son couple et se protéger de tout ce qui peut nous nuire.
D : Nos parents respectifs sont bienveillants et nous soutiennent comme ils le peuvent dans cette aventure.
Nos amis les plus proches ont de l’empathie et il est indispensable de pouvoir se confier à eux quand nous en ressentons le besoin.
Je pense que tout le monde est sincèrement peiné pour nous mais cela peut également se transformer en sujet tabou car certaines personnes de notre entourage ne nous parlent jamais de la situation, alors que de nous-mêmes en amont nous avons à plusieurs reprises ouvert le sujet qui indiquait que nous avons besoin d’attention, de soutien et d’en parler ouvertement. Certains proches n’osent même plus nous annoncer qu’ils vont être parents cela peut créer un sentiment de gêne. Et puis il y a les maladresses des proches, les connaissances qui ne cessent de nous demander « et le bébé c’est pour quand ? », « il faudrait vous y mettre ».
Par moment nous nous sentons totalement isolés, incompris (par exemple lors de la fête des mères ou des pères, les Noël deviennent de plus en plus difficiles car nous ne pouvons pas partager ces moments comme nous le souhaiterions, ce sont des moments de solitude et il faut prendre sur soi surtout lorsque durant ces événements là nous sommes entourés de nos proches qui sont parents).
De manière générale il est évident que nous n’en voulons pas à nos proches car personne n’est responsable de la situation mais par moment nous ressentons le besoin de nous mettre dans notre bulle afin de se recentrer sur nous-mêmes et d’éviter d’avoir des réflexions qui peuvent nous blesser.
Seules les personnes ayant recours à la PMA peuvent parfaitement se comprendre.
Concernant les collègues et notre hiérarchie nous avons la chance d’être entourés de personnes compréhensives, nous laissant libres dans toutes nos démarches. Nous sommes sereins de ce côté-là ce qui n’est pas toujours le cas dans les entreprises.
Quelle est l’influence de la FIV sur le couple ?
D : A l’annonce du problème de stérilité, le couple subit une première grosse étape ressenti comme une douche froide, un sentiment d’injustice. Pourquoi nous ? Comment cela va-t’il se passer ? Va-t’on y arriver ? Le monde s’écroule.
Le couple prend conscience très rapidement des difficultés que cela va engendrer d’avoir recours à la PMA.
Une aventure éprouvante commence que l’on peut qualifier émotionnellement de montagnes russes dont l’effet psychologique est mis à rude épreuve.
Le quotidien est rythmé par les protocoles (les injections, les examens et prises de sang), et le couple est mis à nu au sens propre comme au sens figuré. Souvent l’homme se sent impuissant car il ne subit pas tous les traitements mais son soutien auprès de sa femme est alors primordial.
Les FIV notamment lors des échecs peuvent avoir un impact considérable sur le couple jusqu’à le détruire ou bien au contraire le consolider. Il faut arriver à préserver son couple du mieux possible ; faire des pauses en cas d’échecs, prendre le temps de se retrouver…
Certains vont s’éloigner et être usés de tous les sacrifices et du stress que cela causent. D’autres seront épuisés mais leur priorité restera d’être unis et de s’épauler dans cette (ces) épreuve(s).
Pour notre cas personnel, à aucun moment il n’y a eu de disputes, ou de tensions par rapport à notre projet commun de fonder une famille. Nous avons pour le moment toujours su être protecteurs l’un envers l’autre et se soutenir afin que notre couple ne flanche pas. Je ne dis pas que nous n’avons pas de cicatrices car les traumatismes sont bel et bien là et nous en souffrons mais nous avons au moins la fierté de se dire que notre couple est toujours en vie.
Il faut beaucoup de courage et d’amour pour affronter cette aventure et se dire que nous ne sommes pas seuls pour réaliser notre rêve de devenir parents. La médecine peut aider les couples et c’est une très belle et précieuse aide.
S : Les démarches FIV sont éprouvantes à vivre, personnellement et pour le couple. On culpabilise de ne pas réussir à offrir à l’être aimé un enfant et ce, peu importe d’où vient le problème.
Les échecs sont de lourdes épreuves pour le couple. Il faut d’abord accepter qu’une fiv ne fonctionne pas et à la fois être présent pour l’autre qui ne va pas bien non plus.
Ces périodes peuvent très facilement être source de tension dans le couple lorsque les tentatives s’enchaînent et qu’une souffrance psychologique s’installe. Il faut alors communiquer avec sa moitié, exprimer ses ressentis, faire preuve de bienveillance et redoubler d’attentions.
Alors, le couple s’unit devant les difficultés. On apprend à mieux se connaître grâce aux épreuves et donc à se comprendre. On en ressort plus fort et encore plus amoureux.
Mon mari et moi sommes aujourd’hui les heureux parents d’une petite fille de trois mois qui nous comble de bonheur. J’ai donc une pensée toute particulière pour ceux sont encore en fiv ou qui les commencent. Me remémorer tout ce vécu reste encore très émouvant pour moi. Pour autant, je recommencerai 100 fois s’il le fallait car tenir cet être dans nos bras est indescriptible. Notre vie a commencé à partir de cet instant la. Je ne peux qu’encourager tous ces couples qui souhaitent être parents à se faire aider par la médecine.
Voici le récit de deux femmes, de deux couples qui ont recours à la fécondation in vitro pour devenir parent. Cette aide médicale est de plus en plus utilisée et nous connaissons tous quelqu’un qui y a recours. Ce témoignage nous permettra donc peut être de mieux comprendre ce qu’ils vivent, leur quotidien parfois très éprouvant.